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Article 43 - Protection de l'enfance

 

Article 43 (article R.4127-43 du code de la santé publique)

Le médecin doit être le défenseur de l'enfant lorsqu'il estime que l'intérêt de sa santé est mal compris ou mal préservé par son entourage.


1. Opposition aux soins

Les parents ont certes des droits légaux (art. 371-2 et suivants du code civil) non pas tant sur leur enfant que pour l’intérêt de l’enfant.
Ces droits ne doivent pas s’exercer au détriment de la santé de l’enfant.
L’opposition aux soins préconisés par le médecin pour l’enfant peut avoir des causes diverses : défiance, crainte, ignorance, incompréhension, mésentente entre les parents.
Le médecin doit s’efforcer de les convaincre de la nécessité des soins, leur proposer un autre avis médical et les informer des conséquences dommageables pour l’enfant, en cas d’abstention.
Lorsque les efforts du médecin ont échoué mais que la situation ne présente pas un caractère d’urgence, le médecin rédigera un compte rendu :

  •  précisant les données de l’examen médical et les conclusions thérapeutiques qui en découlent ;
  •  relatant les informations dispensées et la teneur des entretiens menés par le praticien, au besoin accompagné dans sa démarche par d’autres membres de l’équipe médicale.

Il en adressera un exemplaire au Conseil départemental de l’Ordre des médecins, afin de tracer et justifier son attitude le cas échéant.
Dans tous les cas, le mineur a le droit de recevoir une information et de participer à la décision le concernant, d’une manière adaptée à son degré de maturité. Son consentement doit être systématiquement recherché, s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision.
Lorsqu’il existe un danger grave ou que l’état de l’enfant impose une intervention urgente, le médecin passe outre l’avis des parents et dispense les soins nécessaires (voir note 1 ). Il en avisera le procureur de la République qui saisira le juge des enfants aux fins de mise en œuvre d’une mesure d’assistance éducative temporaire.

2. Protection de l’enfance

En dehors des cas de refus plus ou moins explicite des soins préconisés pour le mineur par les titulaires de l’autorité parentale, le médecin peut être amené à relever certains éléments qui lui laissent supposer ou craindre que l’intérêt de l’enfant (voir note 2) est mal compris par son entourage et qu’il se trouve en situation de danger ou de risque de danger. Isolées, ces informations ne permettent pas d’évaluer la situation et de mettre en œuvre si nécessaire, les mesures d’aide à l’enfant, voire à sa famille.
Les dispositions de l’article L.226-2-2 du code de l’action sociale et des familles, issues de la loi n°2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, autorisent le partage de tels éléments qualifiés « d’informations préoccupantes » (voir note 3) entre professionnels concernés par la protection de l’enfance (voir note 4 ).

Cet article précise que : « Par exception à l'article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l'enfance définie à l'article L. 112-3 (voir note 5)  ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d'évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d'aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à l'accomplissement de la mission de protection de l'enfance. Le père, la mère, toute autre personne exerçant l'autorité parentale, le tuteur, l'enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l'intérêt de l'enfant ».

La cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation de l’information préoccupante (CRIP), placée sous la responsabilité du président du Conseil départemental (assemblée délibérante de la collectivité territoriale départementale) a pour mission de centraliser les informations, de les analyser et de rechercher la réponse possible. La finalité de ce recueil d’informations est d'évaluer la situation d'un mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont le mineur et sa famille peuvent bénéficier.
Lorsqu’ils sont préoccupés par la situation d’un enfant (lorsque sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou risquent de l'être), les médecins peuvent utilement contacter le médecin de la cellule.

Le 4ème alinéa de l’article L.221-2 du code du code de l’action sociale et des familles, issu de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant, précise que « Dans chaque département, un médecin référent "protection de l'enfance", désigné au sein d'un service du département, est chargé d'organiser les modalités de travail régulier et les coordinations nécessaires entre les services départementaux et la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes, d'une part, et les médecins libéraux et hospitaliers ainsi que les médecins de santé scolaire du département, d'autre part, dans des conditions définies par décret ».
Lorsqu’un médecin (hospitalier, libéral, PMI…) constate des sévices ou privations, le 3ème alinéa de l’article 226-14 du code pénal s’applique et il doit directement procéder à un signalement judiciaire au Procureur de la République (voir note 6 ), avec information de la démarche faite auprès de la cellule (cf. article R. 4127-44).

 


Notes

(1) 7ème alinéa de l’article L. 1111-4 du code de la santé publique : « Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Dans le cas où le refus d'un traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables ».

(2) Article L.112-4 du code de l’action sociale et des familles : « L’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, psychiques, intellectuels, sociaux et affectifs, ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant ».

(3 ) I. KAHN-BENSAUDE, J-M FAROUDJA, « Signalement et information préoccupante », Rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins de février 2016.

(4) Pour les professionnels de santé, il s’agit notamment des médecins hospitaliers (en particulier des services de pédiatrie, maternité, pédo-psychiatrie, urgences), salariés (Centre Médico-Psychologique, Centre Médico-Psycho-Pédagogique, Service de l’Education Spécialisée et de Soins à Domicile, Institut Médico-Educatif, hôpital de jour…).

(5) Article L. 112-3 du code de l’action sociale et des familles : « La protection de l'enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l'enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits.
Elle comprend des actions de prévention en faveur de l'enfant et de ses parents, l'organisation du repérage et du traitement des situations de danger ou de risque de danger pour l'enfant ainsi que les décisions administratives et judiciaires prises pour sa protection. Une permanence téléphonique est assurée au sein des services compétents (…) ».

(6) Article 226-14 du code pénal : « L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :
1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
2° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;
3° Aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une.
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s'il est établi qu'il n'a pas agi de bonne foi ».